Un jour à Hali [Emun Alton]

- Non, rien.

Et qu'est-ce que je pouvais bien lui répondre qui reste - quand même - de bon ton ? Avec n'importe quelle autre monitrice, cela n'aurait pas fait un pli vu la situation. Ils étaient seuls, clairement à l'aise l'un avec l'autre. Aussi, quelle idée est-ce que j'avais eu de la croiser dans une clairière en plein hiver ? J'aurais dû aller la voir dans sa chambre ou parler le soir, en tête à tête, après une veillée.

Je restai silencieux un moment alors que nous cheminions, côte à côte, ma main tenant toujours la sienne, vers la tour de Hali ne sachant pas trop comment aborder le problème qui était désormais le mien. Mais est-ce qu'au moins je lui plaisais ? Bon, je n'étais certes pas mon cousin Dyan mais je ne rencontrai pas trop de cruelles. Et ce silence qui s'épaississait... Tant pis, la tour n'était plus qu'à une dizaine de mètres et je m'en serai voulu de ne rien dire du tout. Je pris une inspiration et je me jetais à l'eau *.

- Je n'ai pas l'habitude de devoir parler pour être compris. C'est difficile de ne pas... Enfin, je me doute que ce n'est pas évident pour toi non plus, au milieu de nous autres. Je ne voulais pas dire...Enfin, tu vois quoi.

Reish ! J'étais en train de m'emmêler alors que je voulais simplement lui proposer de venir se réchauffer dans ma chambre. Merde, Emun, merde ! Tu racontes n'importe quoi. Je me serai volontiers coller une baffe. Pour un peu, j'allais dire qu'il aurait été bien plus simple pour tout le monde qu'elle soit télépathe. Sûr, elle allait se mettre à pleurer si je racontais quelque chose comme ça.

- Bref. Quand j'ai dit que tout le monde était content que tu sois là, je voulais dire que, moi, j'étais particulièrement content que tu sois à Hali. Plus que les autres. Enfin, je crois.

J'évitai complètement de la regarder curieusement conscient que mes joues avaient désormais une couleur qui devait aller de pair avec celle de mes cheveux du plus pur roux Comyn.

* Terrible sensation, Emun ayant certes appris à barboter dans le lac de Mariposa mais craignant toujours plus ou moins de se noyer (notamment sans bouées).

- Non ! Ne sois pas désolée, tu n'y es pour rien...

Je pris une inspiration, craignant d'être un peu trop virulent dans mes dénégations. Je fronçai les sourcils, ne sachant pas vraiment exprimer précisément ce qui me venait en tête alors que la pauvre en était à s'excuser de ne pas être télépathe. Alors que, pour le coup, je sentais bien la violence de ses émotions, beaucoup mieux qu'auprès d'un vulgaire aveugle mental.

- Dieux ! Non, je voulais dire que j'ai l'habitude de savoir ce que ressentent les autres personnes, surtout ici. Et c'est difficile pour moi que ce ne soit pas le cas, surtout avec toi. Un peu effrayant même... Comme si le fait de n'être qu'entre nous nous empêchait peu à peu d'être à même de comprendre les personnes qui ne partagent pas ce don.

Je tenais toujours sa main dans la mienne, tout à fait conscient de l'agitation qui l'habitait. J'avais à peu près oublié la tour pour l'écouter me répondre et sourit largement en retour, légèrement mal à l'aise mais étonnement léger. Ne sachant pas trop quoi faire de moi-même, je me rendis compte que j'étais en train de me gratter la tête pour me donner une contenance.

- Bien. C'est agréable à entendre.

Je la regardais rougir quelques instants, trouvant clairement que ma propre appréciation de sa personne était facile à comprendre pour n'importe qui.

- Très agréable. Bon, je dois te laisser. Je dois prendre mon tour dans les relais. On se voit plus tard ?

Alors que la discussion se passait pour le mieux, que tout semblait être prêt pour la phase 2, Irmelin prit soudain la mouche et décida de partir à grand pas vers la tour, ayant oublié qu'elle avait quelque chose de très urgent à faire, me laissant là, les bras ballants. Elle avait eu l'air bouleversé. Pourtant tout avait été très clair.

- Bon...

Je lui emboitais le pas, en me disant qu'il y avait certainement des choses que je ne pourrais jamais comprendre chez les femmes. Ceci dit, elle n'était pas depuis très longtemps parmi nous. Et Daleureuth ne m'avait pas semblé être une tour comme la nôtre, ce qui devait être encore plus vrai pour Irmelin.

J'avais complètement l'esprit ailleurs en entrant dans la salle des relais où j'entrepris de me débarrasser de ma cape et de mes bottes mouillées. Dyannis, qui avait pris le tour de garde juste avant le mien, se leva en me jetant un regard bizarre.

Tout va bien, Emun ? Tu as l'air...

Je lui souris, prenant soin de conserver mes pensées, toutes tournées vers Irmelin, pour moi me sentant malgré moi, léger et heureux. Je devais sûrement afficher un sourire béat. Et ma réponse vînt à voix haute.

- Tout va bien, prêt à faire passer les messages.

Une fois confortablement installé dans le fauteuil, je pris plusieurs profondes inspirations, retrouvant le détachement propre à un laranzu se mettant au travail.

Ici Hali.

Quelques heures plus tard, alors que je m'étirais en baillant, mon esprit, malgré la fatigue due à l'extrême concentration sur les écrans des relais tournait toujours autour du même objet. Je passai dans ma cellule pour me rafraîchir et me changer, préoccupé par la longue conversation que j'avais eu avec Irmelin et qui, en y réfléchissant bien, ne me semblait plus si satisfaite que de prime abord. Ou, en tous cas, laissait trop de choses à l'imagination à mon goût.

Après avoir réfléchi à ce que je devais dire, avoir fait les cent pas, m'être décidé à y aller, y avoir renoncé, je me retrouvai devant sa porte où, après m'être annoncé d'une pensée, souvenu que ça ne servait rien, avoir cherché comment faire, je finis par frapper doucement.

Je ne sais pas si elle était contente ou non de voir que j'étais venu la retrouver directement après mon tour de garde mais, en tous cas, elle avait l'air surprise. Difficile de dire si c'était une bonne chose. Mais cela me confortait dans le fait que notre conversation n'avait peut-être pas été aussi éclairante que je l'avais jugé de primer abord.

- Hey...

Je m'appuyais contre le chambranle, un peu gêné par son silence, et regardai autour de nous pour me donner une contenance.

- Du coup... J'ai fini mon tour de garde dans les relais et je me disais que, avant d'aller manger...Bref, j'avais une question à te poser si tu as le temps.

Parfait. Elle n'avait pas l'air trop occupé. De toutes façons, comme elle ne pouvait pas prendre de garde dans les relais ou bien travailler avec le cercle, elle avait un peu plus de temps pour elle que les autres. Elle se tourna vers la chambre, me faisant comprendre que je pouvais entrer.

- Oui, ici, c'est très bien.

J'avançai sans plus de façon dans la cellule, semblable à la mienne mais nettement mieux rangée et sentant meilleur, il fallait l'avouer.

- Tu t'es entrainée au rryl pour ce soir ? Evite les chansons à boire parce qu'ils ont vraiment pas mal abusé au solstice.

Ranald m'avait juré que jamais, ô grand jamais, il ne retoucherait une goutte d'alcool ou bien une fleur de kireseth. En tous cas, je ne savais pas vraiment comment elle jouait mais je supposais que, comme beaucoup de filles de notre caste, on lui avait appris qu'une damisela devait absolument savoir coudre, chanter, danser et jouer d'un instrument de musique. Ce qui, je devais l'avouer, était parfois agréable mais finalement assez ennuyeux. Je me plantai au milieu de la pièce, mains dans la poche, me sentant un peu à l'étroit dans cette pièce qui constituait désormais l'intimité d'Irmelin. Allez Emun, il fallait l'ouvrir plutôt que de parler de banalités.

- En fait, je voulais te poser une question. Parce que je ne suis pas sûr. Toute à l'heure, tu as dit que tu m'aimais..bien ? Donc, je me demandais. Est-ce que tu m'aimes bien...euh...de façon amicale ou bien est-ce que tu m'aimes bien, m'aimes bien ?

- Sur la mer ?

J'imaginais que toutes les chansons à Daleureuth devait avoir un lien avec les vagues, le large, les moules et les cormorans. Un peu comme toutes les chansons des Hellers étaient tragiques, liées à la mort, la neige, le voyage et l'odeur de chien mouillé. En tous cas, cela me changerait du répertoire des chansons à boire qui était à peu près le seul que je connaissais suffisamment bien pour me lancer dans le chant. Je doutais que chanter une paillarde au sujet des vingt-quatre leronis qui avaient été à Ardcarran soit tout à fait ce que Irmelin voulait entendre.

Je jetais un coup d'œil sur ce qui composait son environnement particulier. C'était, quelque part, aussi intime que de partager un rapport mental. Il y avait là les objets qu'elle touchait, le lit où elle s'allongeait, les vêtements qu'elle avait porté. Elle semblait nerveuse. Moi assez peu au final, j'avais surtout besoin d'une clarification.

- Ah. C'est bien. Très bien. Je suis désolé, je sais que c'est gênant d'avoir à l'exprimer à haute voix.

Elle était nerveuse, cela se voyait à la façon dont elle tournait les plis de sa jupe entre ses doigts. Je la regardai quelques secondes et, pris d'une soudaine impulsion, je me penchai sur elle pour poser mes lèvres sur les siennes et l'embrasser. Ce fut un bref baiser, assez doux.

- Clairement, moi aussi.

Je me redressai et la regardai avec attention, guettant le rythme de son souffle, la dilatation de ses pupilles, tous ces signes que l'on m'avait un jour appris à reconnaître au tout début de ma formation. Elle semblait gênée, comme ne sachant pas quoi faire d'elle, ce qui me changeait - il fallait le dire - des autres femmes qui vivaient à la tour et qui, bien souvent, savaient exactement ce qu'elles voulaient de moi. L'heure du repas arriverait bientôt et...et elle se mit à chanter. Une chanson de chez elle puisqu'elle évoquait Hali'ymin et femmes de la mer. C'était joli. Etrange mais joli. Pour ma part, je n'aurais pas pensé à chanter en un moment comme celui-ci. De toutes façons, la majeure partie de ma capacité à la réflexion semblait s'être fait la malle vers mon haut-de-chausse.

- Euh... C'est joli mais pourquoi ? Tu as besoin de t'entrainer avant ce soir ?

Pour ma part, ce n'était pas le type de vocalises que j'avais réellement envie d'entendre à ce moment précis. Je me rapprochai d'elle pour l'embrasser à nouveau, espérant que cela ne provoque pas une nouvelle chanson. Peut-être sentirait-elle l'urgence de mon baiser ? Je ne savais pas vraiment si nous aurions assez de temps mais sa couche, à quelques mètres de là, attirait mon regard.

- Tu as l'air un peu perdu. Tout va bien ?

- J'imagine...

Comment aurait-elle pu avoir l'habitude de partager si franchement ses pensées, ses émotions sans être télépathe ? Quelque part, je me demandais à quel point cela pouvait être difficile à vivre. Je n'aurais pas pu me sentir ainsi aveugle, incapable d'être conscient des pensées superficielles des autres.

- Très bien.

Je lui souris à nouveau et me rapprochai d'elle pour l'embrasser. Encore. Je ne savais pas vraiment à quelle heure était le repas mais, peut-être, était-il possible de ne pas descendre et de profiter de l'instant présent. Je la serrai contre moi, plus étroitement. Difficile de ne pas sentir l'envie qui m'avait étreint. Doucement, je la poussai vers le lit.

- Nous serons plus confortablement installés...

Emun pressa ses lèvres sur les miennes. Je répondis à son baiser, murmurant son prénom contre ses lèvres. Il avait une odeur boisée qui rappelait celle des feuilles froissées et le parfum chaud du foin coupé. Il me serra contre lui et je fermais les yeux, grisée par ses baisers. Je ne pus ignorer l'émotion qui s'était emparée de lui. Lorsqu'il s'écarta et me poussa vers le lit, je pris quelques instants pour le regarder. Plongeant mon regard dans le sien, je m'interrogeais. Tout allait très vite. Etait-ce le bon moment ? Je réalisais qu'il n'y en avait ni de bon, ni de mauvais, seulement des moments gâchés par trop d'impatience, de peur ou de prudence... Après un sourire, je saisis le cordon qui maintenait ma robe fermée et tirai sur le lien. J'avais choisi de l'aimer.

Elle murmurait mon prénom alors que mes baisers enfiévrés se faisaient de plus en plus pressant, mes mains entreprenantes, mon bassin, comme animé d'une vie qui lui était propre, rêvant de se passer tout de suite les couches de vêtement qui empêchaient nos peaux de se retrouver. Mes lèvres s'égarèrent sur sa nuque, la charge érotique de cette caresse, m'excitant particulièrement.

Je crus que j'allais perdre tout à fait la raison quand elle défit d'elle-même le cordon qui retenait le devant de sa robe, dévoilant une partie de sa poitrine. Rapidement, je fis passer ma chasuble par dessus ma tête, la jetant au sol sans un égard, torse nu et m'avançait vers elle avec un regard affamé. Mes mains la saisirent fermement et j'écrasai mes lèvres sur les siennes avant de l'allonger sur sa couche et de me glisser contre elle, déterminé à ne laisser aucun endroit de son corps libre du contact de mes mains ou de ma bouche.

Quelques instants plus tard, je pris une profonde inspiration, bien déterminé à ne pas me laisser emporter trop rapidement par la violente pulsion qui commandait totalement mon bas-ventre. Cette étreinte était surprenante, j'avais l'impression d'être redevenu un adolescent, ne sachant comment procéder et je me rendis compte que l'absence de télépathie y était pour beaucoup. Cela ne me gênait guère, de fait - ce que je trouvais presque surprenant - mais la vigueur de mon excitation ne pouvait être prise en défaut. Je sentais son émoi mais devait au moins m'assurer que nous étions bien sur la même longueur d'onde sur la suite des événements.

- J'ai très envie de toi, Irmelin.

Et tant pis si nous arrivions au dîner, échevelés et les joues rougies. Tout en parlant, ma main parcourant son ventre et l'intérieur de ses cuisses, découvrant sa moiteur.

Sa main s’approche, effleure mes épaules. Je frémis de plaisir en ployant ma nuque sous la caresse. Je sens un éclair de chaleur me traverser alors qu'il pose ses lèvres sur ma peau. J'incline la tête vers lui, signe d'un abandon manifeste.

Je finis de me dévêtir, non sans mal. La robe tombe à mes pieds dans un bruit sourd. Je tourne mon regard vers lui, je m'aperçois qu'il est à demi nu. Je l'observe avec une curiosité non feinte, détaillant son corps que je n'ai jamais vu qu'habillé. Je découvre son torse, ses épaules, sa peau dénudés. Je me leve sur la pointe des pieds et colle ma peau contre la sienne. Je désire ardemment sentir ses mains sur moi et réponds à ses baisers avec une certaine avidité. 

Sur le lit, je me tends vers lui. Il s'empresse d'aller à la découverte de mon corps avec ses mains et ses lèvres, je le laisse faire bien que je me sente gauche. C'est bête de se sentir comme ça, me dis-je. Chacun de ses effleurements me fait tressaillir. Je finis par saisir l'une de ses mains et dépose mes lèvres dans le creux de sa paume. Le baiser est intime. Je sens sa main sur ma poitrine qu’il presse délicatement, longuement, puis glisse avec une lenteur calculée vers mon ventre. La chaleur qui se dégage de mes cuisses humides semble attirer sa main. Un soupir m'échappe. Le contact de ses doigts me fait tressaillir. Je pose une main sur la sienne, l'arrêtant tout à fait. 

- Emun... Je dois te dire quelque chose... 

J'ouvre la main, je l'approche de son visage. Lentement, lentement. Mes lèvres migrent vers son cou, j'inspire son odeur de forêt. Le moment est propice. Je lui chuchote ce qui ne peut pas se dire.

- C'est la première fois.

Je me recule, cherchant son regard.

Mes lèvres se perdent dans les plis et les replis de son corps abandonné à mes caresses. Ma bouche vient cueillir les soupirs qui s'échappent de la sienne alors que mes mains parcourent ses cuisses avec une fièvre d'une calme impatience. Sa main, posée sur la mienne, arrête mes caresses auxquelles elle est pourtant si réceptive. J'approche mes lèvres de son oreille, joueur :

- Dis-moi...

Mes dents maltraitent tendrement une oreille tandis qu'elle se recule pour m'expliquer qu'elle n'a jamais connu d'homme aussi intimement. Pourtant, après une partie de sa vie passée à la tour, j'aurais cru... Je m'appuie sur un coude, la dévisageant avec douceur.

- Ils ne sont décidemment pas doués à Daleureuth.

Rétrospectivement, je ne sais pas si cette première fois est si importante, au final. Je garde un souvenir ému du foin de la grange d'Armida mais la brièveté de la chose n'avait pas rendu l'expérience mémorable. Un nouveau petit sourire et mes lèvres viennent à nouveau cueillir les siennes.

- Ceci dit, si tu veux arrêter ou continuer mais t'arrêter plus tard parce que tu as mal, il suffit que tu me le dises. Ce ne sera pas bizarre, il te suffit de le dire.

Emun s'approche, curieux d'entendre ce que j'ai à lui dire. Ses lèvres sont un doux supplice, je frémis comme une feuille. A son expression, je constate que la nouvelle est une surprise. La petite pique qui suit me tire un sourire amusé. 

- Tu trouves aussi ?

Je laisse ce sujet mourir à dessein. Je réponds à son sourire, ses lèvres s’approchent. Je sens son souffle chaud sur ma peau avant de sentir le contact de ses lèvres. Je ne reconnais rien de ce que j'ai connu. Il me questionne, je réfléchis. Je sens son désir ardent et j'apprécie sa retenue. En guise de réponse, je prends un de ses mains et la serre dans la mienne. 

- D'accord...

Je m'abandonne à lui. C'est sur sa peau nue que ma main voyage.

Un baiser enfiévré répond pour moi à la question mutine qu'elle pose. Rien ne m'étonne beaucoup de la part de Francesco mais je ne peux m'empêcher de penser à quel point ses limites confinent à la bêtise. Irmelin est belle, comme le sont les Comynara Aillard des basses terres : une peau laiteuse, des yeux gris, des cheveux roux soyeux...

Mes mains continuent de parcourir son temps, prenant le temps d'en découvrir les moindres secrets tandis que ses soupirs me poussent à poursuivre toujours plus loin mon exploration. En me tortillant, je fais descendre mon haut-de-chausse sur mes chevilles et, précautionneusement, je m'attache à faire mienne la jolie pucelle de Daleureuth.

Il se précipite, capturant mes lèvres en un baiser passionné. J'en profite pour l'éteindre plus intimement, laissant mes doigts le caresser doucement. Je dépose quelques baisers sans savoir où. L'important n'est pas de savoir ces détails, juste de sentir sa peau contre la mienne.

Son regard me transperce, l'appel est implicite. Les lèvres gonflées, je le regarde se défaire de son haut de chausses, curieuse et nerveuse à la fois. Les lèvres entrouvertes, j'accueille dans mon moelleux la dureté de son sexe qui me pénètre sans heurt. Pour la première fois.

Un plaisir tout simplement. Encore que l'affaire le soit le plus souvent, peu important la partenaire. Mais que cela tienne en notre relation nouvelle et particulière, au fait que nous nous tournions autour depuis un moment, je sentais les délicieux aiguillons de la jouissance caresser mes reins remuant et remonter jusqu'à ma nuque qu'elle effleurait parfois de ses doigts.

De temps à autre, je calme mes mouvements, cherchant mon souffle et prenant garde à ne point atteindre le point de non-retour trop rapidement de façon à profiter pleinement de l'instant. J'accroche son regard, autant car la regarder m'émeut et m'excite, autant que pour être certain que tout se passe bien également de son côté de l'équation.

Je tente également de lui donner le contrôle de la situation maintenant que nous avons bien entamé les choses, m'allongeant sur le dos pour la laisser prendre les choses en main, essayant tant bien que mal de réussir à me contrôler. Ce qui est rapidement peine perdu. Dans la fièvre de ces premiers instants de complicité, les mains posées sur sa poitrine, je ne peux me retenir bien longtemps et succombe finalement à ses mouvements de croupe en un long râle , les reins cambrés, le corps agité des soubresauts annonçant la petite mort.

Il me faut un long moment pour revenir à la réalité, retrouver mon souffle et croiser à nouveau son regard. Je l'attire contre moi, repus, sans savoir ce qui est d'habitude évident avec d'autres télépathes. Une sorte de plénitude a envahi la chambre, un calme serein. Je pourrais lui demander si tout s'est bien passé, m'excuser d'avoir peut-être été trop rapide...mais je n'en ressens pas vraiment le besoin.

- C'était...intense.

Ce sont les seules paroles qui me viennent à l'esprit. Plus qu'avec bien d'autres mais je suis trop bien élevé pour le dire aussi rapidement. Je sais également que, d'ici quelques minutes, j'aurais envie de recommencer, de retrouver cet état de plénitude. Sa tête s'est nichée dans le creux de mon épaule et mes lèvres viennent se poser silencieusement sur ses cheveux. Je la caresse doucement, tendrement, avant de reparler :

- Tout va bien ?

Je sens son sexe en moi. Le rythme change, une chaleur se propage. Je lui caresse le dos, mes doigts l'effleurent, finissant leur course sur ses fesses que je presse. Vigilante, je tente de percevoir ses mouvements de bassin que j'associe à mes propres sensations. 

Il se dégage avec douceur et m'incite à le chevaucher. Je me sens de nouveau gauche, ces gestes je les apprends. Avec son aide, je m'installe, il intime un mouvement que je suis. Concentrée sur mes sensations, j'accroche son regard bleu-gris qui me sert d'ancrage. Je me cambre, réceptive à ses mouvements, à ses oscillations mais l'instant ne dure pas. Ses mouvements de bassin s'accentuent, je me laisse porter, presque étonnée lorsqu'il râle. Je perçois des contractions, accentuées par son plaisir que je sens violent, libérateur. J’embrasse sa bouche, comme pour attraper sa jouissance, la faire mienne. Et je le serre fort. Lorsqu'il m'attire à lui, je posa ma tête sur sa poitrine. Je reste écouter son cœur qui bat avec régularité. L'instant m'émeut, je laisse échapper un soupir, bouleversée par cette étreinte. Je ne sais comment le lui dire... 

Emun laisse échapper quelques mots, visiblement satisfait. Mes lèvres s'égarent sur son torse, je le caresse du bout des doigts. Sa question me tire un « Mmmh », que j'explicite plus avant d'une voix devenue rauque.

- Je vais bien...

Relevant la tête, je cherche son regard avant de cueillir un rapide baiser sur ses lèvres. Quelque chose coule le long de ma cuisse, me redressant, je constate qu'il s'agit d'un peu de sang mêlé à sa semence.

Machinalement, ma main caresse ses cheveux tandis que mes yeux fixent le plafond. Je me laisse emporter par une douce torpeur et grogne doucement quand elle se relève quelques instants pour faire je ne sais quoi. L'absence de sa peau contre la mienne crée un frisson et je la ramène contre moi, la serrant presque tendrement. Je m'étire une seconde, passe une main sur mon sexe encore humide, main que j'essuie ensuite nonchalamment sur les draps froissés.

Les minutes passent sans que je ne les comptes, marquées par le silence bienheureux des corps (le mien en l'occurrence) repus quand, petit à petit, la chaleur de son corps contre le mien me réveille. Je me dégage lentement de sa tête, emprisonnant mon bras pour venir poser mes lèvres sur les siennes. Mon corps s'est réveillé, mon envie d'elle également et, ce que je ne peux lui dire par le partage de nos pensées les plus intimes, je tente de le lui faire savoir par mes gestes et mes caresses. Parler me paraît superflu, presque grossier.

Mes lèvres glissent vers sa nuque tandis que mes mains reprennent possession de ses formes, les modèlent, les parcourent. Mon envie d'elle se fait plus douce, plus patiente alors que mon excitation ne fait pourtant aucun doute. Rassasié par notre joute précédente, je prends désormais le temps de laisser monter délicatement notre plaisir.